Tensions sur le marché français des télécoms : SFR en voie de cession ?
Le paysage des télécoms en France pourrait basculer. Selon plusieurs sources proches du dossier, Patrick Drahi, actionnaire majoritaire d’Altice France, envisagerait de se séparer de SFR. Bien qu’aucune annonce officielle n’ait encore été faite, les tractations en coulisses s’intensifient, augurant d’un possible remaniement d’ampleur dans le secteur.
Une dette qui dicte la stratégie
Altice est depuis longtemps plombée par un endettement massif. Dès 2016, les tentatives de consolidation — comme l’éventuel rachat de Bouygues Telecom par Orange — avaient déjà provoqué l’alerte des régulateurs. Plus récemment, en février 2025, Patrick Drahi a réussi à renégocier une partie de sa dette, la réduisant de 24 à 15,5 milliards d’euros via des cessions d’actifs comme BFMTV ou La Poste Mobile. Néanmoins, malgré ces arbitrages, la dynamique reste fragile : SFR a perdu plus de deux millions de clients depuis 2023.
Dans cette configuration, céder SFR serait un levier supplémentaire pour désendetter Altice. Ce choix serait cohérent avec la logique historique de Drahi, fondée sur des opérations de LBO (leveraged buy-out) et d’optimisation d’actifs. Reste à mesurer l’impact d’un tel mouvement sur l’ensemble de la chaîne de valeur du marché télécom.
Des options limitées, des enjeux massifs
SFR, bien que fragilisé commercialement, conserve une valorisation estimée à environ 20 milliards d’euros. Ce ticket d’entrée rend un rachat total par un acteur unique peu probable : un rapprochement avec Orange conduirait à une situation quasi-monopolistique, inacceptable pour les autorités de la concurrence. De leur côté, Free ou Bouygues Telecom atteindraient une taille critique qui bouleverserait l’équilibre concurrentiel.
Un scénario alternatif consisterait à découper SFR : réseau mobile, backbone fibre, points de vente, base clients… Chaque entité pourrait être cédée séparément. Cette stratégie de démantèlement progressif permettrait potentiellement une meilleure valorisation, mais elle présente des risques opérationnels et réglementaires significatifs, notamment autour de la fragmentation d’actifs stratégiques.
Un dossier ultrasensible pour les régulateurs
Quel que soit le schéma retenu, toute opération autour de SFR devra obtenir le feu vert des autorités françaises et européennes. Les échanges préliminaires entre les opérateurs historiques laissent déjà entrevoir un ballet d’analyses réglementaires à venir, avec la Commission européenne en arbitre final.
Pour Drahi, ce possible désengagement est à double tranchant. Garder la main sur Altice tout en lâchant SFR pourrait être interprété comme un repli tactique sous pression. Mais cela pourrait aussi être vu comme une manœuvre stratégique pour stabiliser un groupe financièrement fragilisé.
Si cette cession se confirme, elle constituerait un tournant historique dans les télécoms français, avec des répercussions à la fois sur la structure du marché et sur les offres proposées aux consommateurs. Pour l’instant, les acteurs restent en alerte, dans l’attente d’une officialisation.