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Jeunesse sous influence : l’ère numérique accélère la perte de repères, entre porno en accès libre, téléréalité décadente et Parcoursup anxiogène

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À l’ère du tout-numérique, la jeunesse française se retrouve livrée à des réseaux sociaux permissifs, des influenceurs sans repères et une bureaucratie opaque comme Parcoursup. Entre téléréalité sexualisée, accès massif à la pornographie et perte de contrôle sur l’orientation scolaire, qui protège encore nos enfants – et comment la société laisse-t-elle s’installer ce chaos éducatif et moral ?

Jamais la jeunesse française n’aura été autant livrée à elle-même face à la déferlante numérique : alors qu’un tiers des mineurs accèdent déjà à la pornographie en ligne, que les réseaux sociaux comme X (ex-Twitter), Snapchat ou Telegram laissent circuler sans filtre contenus adultes, propagande et influenceurs issus de la téléréalité, des centaines de milliers de jeunes vivent, au même moment, l’angoisse de leur avenir, suspendus aux caprices d’une machine bureaucratique nommée Parcoursup. Aujourd’hui, en 2025, il suffit d’un smartphone à Paris, Marseille ou en banlieue pour s’exposer – souvent par accident – à des images volontairement choquantes ou à la promotion d’une sexualité dévoyée, sous couvert de “liberté” ou d’entrepreneuriat facile. Associations de protection de l’enfance, comme Cameleon ou l’Open, s’alarment : jamais les codes de l’influence et de la pornographie n’ont été à ce point perméables. Pourtant, l’État, obnubilé par la régulation des flux de dossiers administratifs, laisse faire et délègue l’éducation des jeunes à des plateformes étrangères, aux algorithmes incontrôlés, abandonnant toute idée de hiérarchie ou de repère culturel. Qui façonne la vision du monde de nos enfants ? Peut-on sérieusement encore parler de “progrès” quand la société, fascinée par l’instantané, organise sa propre décadence numérique ?

Une génération surexposée aux dérives numériques

Jamais la jeunesse française n’a été autant exposée à l’offensive d’un numérique sans entraves, où l’absence d’autorité et de frontières concrètes a littéralement fracturé les processus de construction. Selon l’Arcom, près de 30 % des internautes ayant fréquenté des sites pour adultes ont moins de 18 ans – soit 2,3 millions de mineurs –, et plus de la moitié des garçons de 12 ans visitent au moins mensuellement ce type de plateformes. Une réalité accablante face à la passivité de l’État. Sur X (anciennement Twitter), Snapchat, Discord ou Telegram, la “vérification d’âge” n’est qu’une formalité contournée par n’importe quel collégien.

Du côté des associations de protection de l’enfance, l’alerte est sévère. Eglantine Cami (Cameleon) souligne : « Une grande partie des mineurs sont exposés la première fois à la pornographie accidentellement ou involontairement. » Plus inquiétante encore est la porosité croissante entre l’univers des “influenceurs” issus de la téléréalité et la culture du porno. Ces nouveaux modèles, analyse Thomas Rohmer (Observatoire de la Parentalité et de l’Éducation Numérique), recrutent une jeunesse fascinée par les promesses de gains faciles et drainent ensuite vers des plateformes payantes comme OnlyFans : « C’est comme si, pour une certaine génération, Brigitte Bardot, Alain Delon et Jean-Paul Belmondo, après avoir fait la une de Paris Match, avaient tous décidé de se lancer dans le porno. »

À cette déliquescence des repères s’ajoute l’angoisse institutionnelle : Parcoursup, la plateforme nationale d’orientation scolaire, laisse chaque année plus de 100 000 bacheliers en attente ou sans affectation à l’issue de la session principale. Maëlle Nizan, présidente de la Fage, décrit une “détresse” palpable : « On reçoit tous les jours plein de jeunes qui sont en gros stress et en détresse parce qu’ils n’ont pas forcément de réponse. (…) C’est cette opacité qui va mettre les étudiants dans une grande détresse. » Le manque de transparence sur les critères de sélection, combiné à l’impression de loterie, fragilise la confiance des jeunes, ouvrant la porte à un sentiment d’errance et d’abandon.

En toile de fond, l’irresponsabilité numérique prospère. L’Observatoire du Long Terme souligne dans un rapport le rôle purement technique, parfois fataliste, des plateformes : « La mise à disposition facilitée de moyens de concevoir, d’éditer, de partager et de commenter des messages a créé un champ d’affrontement informationnel où cohabitent sans hiérarchie les publications, des plus sérieuses et argumentées au plus diffamatoires et mensongères. » Les algorithmes dictent la viralité ou l’oubli d’une information, brouillant la hiérarchie des valeurs et la perception du réel.

Conséquence : déracinement accéléré, rapport faussé à la sexualité, aversion pour l’autorité traditionnelle, atomisation sociale et montée des addictions numériques. De la salle de classe aux groupes Telegram, la jeunesse n’est plus éduquée mais livrée, entre influenceurs sans scrupules et bureaucratie automatisée, à une société anesthésiée face à ses dérives.

La crise des repères à l’ère de la globalisation numérique

La crise des repères chez la jeunesse n’est pas née avec le numérique, mais celui-ci l’a accélérée jusqu’à l’absurde. Historiquement, la transmission des valeurs passait par la famille, l’école et les cercles locaux – des piliers aujourd’hui remis en cause par l’intrusion massive de l’écran et du capitalisme numérique globalisé.

Au tournant des années 2000, on dénonçait la mise en scène de l’intime et la glorification de la vulgarité par la téléréalité. Deux décennies plus tard, la situation a empiré : la téléréalité déborde sur les réseaux sociaux, où elle se confond avec l’influence commerciale et la « culture porno ». L’effet n’est plus marginal mais massif : selon l’Arcom, 30% des utilisateurs de sites adultes sont mineurs, et plus de la moitié des garçons de 12 ans y accèdent chaque mois. Cette banalisation se constate ailleurs en Europe : Italie, Espagne, Allemagne connaissent des dérives similaires, avec une perte d’autorité parentale et scolaire.

La France, dotée de lois strictes (loi SREN, interventions de l’Arcom), reste impuissante face à des géants du Net étrangers. Aux États-Unis, des études évoquent la croissance des addictions numériques et de l’angoisse adolescente. Au Royaume-Uni, les pouvoirs publics parlent de « pandémie silencieuse » de troubles psychiques alimentée par la culture de l’instantané et la sexualisation précoce.

Sur l’orientation des jeunes, la France n’est pas épargnée par une logique bureaucratique déshumanisante : Parcoursup accentue le sentiment de loterie et de solitude, alors qu’en Allemagne et en Suisse, l’accompagnement individualisé et les filières duales restent valorisés. Il y a cinquante ans, l’accès à des formations techniques ou à des métiers avait un sens ; aujourd’hui, l’algorithme décide, sans racines ni perspectives.

L’explosion des innovations technologiques – intelligence artificielle, plateformes mondialisées – confronte les sociétés occidentales à une nouvelle insécurité : celle de l’information continue, sans hiérarchie, où cohabitent le vrai, le faux, l’utile et l’odieux. Ce choc est mondial, porté par l’Amérique qui exporte ses modèles divertissants, et une Europe qui subit – ou accompagne ? – la dérégulation sans filtre.

Face à cet effondrement progressif des repères, la France, autrefois « fille aînée de l’Église, patrie des Lumières », n’est plus qu’une province numérique, soumise aux lois d’une mondialisation où l’enfance et la jeunesse sont livrées sans filtre aux grands marchands et pseudos-influenceurs. Cette réalité appelle un sursaut, avant qu’il ne soit trop tard.

Repères et chiffres clés

  • Exposition précoce à la pornographie : En France, près d’un jeune sur trois fréquentant un site pornographique a moins de 18 ans, soit environ 2,3 millions de mineurs. Plus de la moitié des garçons de 12 ans sont concernés chaque mois, et près de deux tiers des 16-17 ans.
  • Réseaux sociaux, zones grises juridiques : Malgré la fermeture théorique de l’accès des sites pour adultes depuis 2024 (loi SREN), l’absence de contrôles techniques sérieux sur X, Snapchat ou Telegram rend la restriction inefficace. Les mineurs les contournent par de simples déclarations mensongères lors de l’inscription.
  • Influenceurs et téléréalité : Des figures issues de la téléréalité se transforment en “vendeurs de contenus pour adultes” sur OnlyFans ou MYM. Comme le pointe Thomas Rohmer, les codes sont brouillés, la sexualité marchande s’invite dans la sphère juvénile et la notoriété sert de passeport à la marchandisation du corps.
  • Parcoursup, anxiété généralisée : La plate-forme nationale Parcoursup génère chaque année des milliers de situations d’angoisse psychologique chez les bacheliers, qui souffrent d’un manque d’informations et d’un sentiment d’abandon. Les plateformes d’aide comme sos-parcoursup.fr enregistrent une hausse constante des sollicitations.
  • Désinformation et viralité : L’Observatoire du Long Terme démontre comment la diffusion sans filtre de contenus brouille toute hiérarchie de l’information. Quelques clics suffisent à garantir la viralité, fake news comprises, et à entretenir l’effet de meute.
  • Échec de la régulation nationale : Les associations estiment que seule une pression européenne (via le Digital Services Act) contraindra les plateformes numériques, puisque la France reste impuissante face aux géants internationaux.
  • Illusion de solutions techniques : Les outils de contrôle parental ou de filtrage sont facilement contournés. Malgré l’innovation, la maîtrise technique reste illusoire devant l’accès généralisé et le nomadisme numérique des jeunes.

Quelles pistes pour reprendre la main ?

La question de la jeunesse à l’ère numérique ne peut se limiter à un simple ajustement réglementaire. Associations, parents, institutions européennes multiplient les initiatives : interventions scolaires, mentorat, groupes de parole parents-enfants. Le calendrier législatif européen (Digital Services Act), les efforts en matière de vérification de l’âge et l’alignement des plateformes de contenus et réseaux sociaux seront des enjeux majeurs pour la protection des mineurs.

Sur le terrain éducatif, de nombreuses initiatives locales œuvrent pour réinstaurer des repères. Reste à savoir si elles suffiront à compenser l’atomisation provoquée par la toute-puissance des écrans et la logique marchande.

Pour les familles en recherche d’appui, il existe des ressources pratiques, de la plateforme SOS Parcoursup à l’accompagnement par des associations engagées pour la souveraineté numérique. Mais il reviendra à chaque acteur – parent, éducateur, citoyen – de se saisir du débat et de rappeler qu’éduquer, c’est aussi protéger.

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