Aux États-Unis, entre crispations politique, montée des discriminations et retrait sur les enjeux climatiques, le bien-être collectif est-il encore possible ? Tandis que des familles européennes tournent le dos au « rêve américain », citoyens et communautés locales inventent pourtant de nouvelles formes de résilience et de solidarité, malgré l’adversité.
Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier 2025, les États-Unis connaissent une montée des tensions : recul des droits des personnes trans et LGBT+, hausse du sentiment d’insécurité, retrait de la scène internationale sur les grandes questions écologiques. Cette crispation a des retombées sociales et humaines concrètes : peur, isolement, difficultés économiques, défiance vis-à-vis de l’avenir – au point de détourner un nombre croissant de touristes et de familles, désormais inquiètes de séjourner outre-Atlantique.
Partout aux États-Unis – dans des villes progressistes comme Athens (Géorgie), théâtre de marches des fiertés sous tension, dans les espaces ruraux où le repli identitaire se renforce, dans les forums de familles et d’associations qui inventent de nouveaux espaces d’inclusion ou de résistance – la société américaine fait face à des politiques restrictives et à un climat de peur et d’autocensure. Cela se traduit par l’interdiction des personnes trans dans certains secteurs, l’arrêt de procédures de reconnaissance de genre, la baisse de la participation aux événements climatiques internationaux, et une multiplication d’actes militants ou de soutien dans la société civile.
Le désengagement écologique des USA renforce le sentiment d’isolement, l’exclusion des minorités alimente la défiance et la détérioration de l’image internationale du pays crée un effet boule de neige sur le tourisme et les relations avec l’Europe. Pourtant, dans ce contexte, de nombreuses familles, activistes, thérapeutes et communautés cherchent à recréer des îlots de bien-être et de résilience, réinventant chaque jour des alternatives face à l’adversité.
Depuis son retour à la présidence, Donald Trump a opéré un net repli conservateur qui affecte de nombreux aspects du bien-être aux États-Unis. Sur le plan politique et social, le climat s’alourdit : la montée des discriminations, en particulier envers les personnes LGBT+, fragilise l’équilibre de millions de citoyens. La Géorgie, comme d’autres États républicains, devient le théâtre d’une anxiété grandissante. Avant Trump, trouver un emploi était facile, maintenant je dois soumettre dix candidatures pour avoir du travail… Je vis dans une petite ville et j’ai peur de sortir seule,
témoigne Alexis, jeune femme trans de 32 ans, lors d’une marche organisée à Athens. Pour elle, comme pour d’autres, la sécurité personnelle et le « droit d’être » sont devenus des combats permanents.
On estime à plus d’1,5 million le nombre de personnes transgenres aux États-Unis, vivant désormais dans un contexte marqué par l’annulation de nombreux droits acquis, comme l’accès à l’armée, aux sports ou la reconnaissance de leur identité sur les documents officiels. Les organisations de défense des droits humains notent une hausse des agressions et des incidents de harcèlement, tandis que les marches des fiertés, loin d’être de simples fêtes, s’imposent comme une forme de résistance parfois sous tension.
Sur le plan international, le désengagement américain est palpable sur la question climatique. Lors de la dernière Conférence des Nations Unies sur les océans à Nice, l’absence des États-Unis n’a surpris personne. Comme le souligne l’économiste Jean Pisani-Ferry : Les États-Unis sont un acteur marginal sur le climat. Ce désengagement des grands sujets multilatéraux nous oblige à apprendre à agir sans eux.
Cette mise à l’écart sur la scène écologique mondiale coïncide avec une détérioration de l’image du pays : le gouvernement américain accuse déjà 12,5 milliards de dollars de manque à gagner lié à la fuite des touristes internationaux en 2024, conséquence directe de la défiance croissante, notamment des Français, vis-à-vis de la politique états-unienne. Une agence de voyage française constate ainsi une baisse de 20 % sur la destination
, les messages d’annulation et de report se multipliant sur les réseaux.
Les conséquences sont multiples et se répercutent sur la santé mentale collective : isolement, anxiété face à l’incertitude, sentiment d’insécurité pour les minorités, mais aussi pour de nombreuses familles partageant des valeurs écologiques et d’ouverture. Pour beaucoup, la question n’est plus seulement économique ou politique : Ce n’est pas nous qui avons un problème, c’est Trump,
affirme Anaiah, 42 ans, qui insiste sur la difficulté de vivre authentiquement dans ce climat. La crise de confiance qui traverse la société américaine devient un enjeu de bien-être profondément collectif : comment maintenir, nourrir ou réinventer l’harmonie intérieure quand l’environnement social, politique et naturel s’avère lui-même fragilisé ?
Un contexte historique fragilisé
Longtemps considérée comme la terre du possible, l’Amérique a bâti sa légende sur le « rêve américain ». Mais ces dernières années, plusieurs tendances convergent pour fragiliser ce mythe. Le retour de mesures conservatrices a balayé nombre d’avancées sociétales et écologiques : recul des droits pour les minorités, discours clivants, multiplication des lois restrictives. Les conséquences se vivent concrètement, comme en témoignent Alexis ou Eliott, pour qui la liberté de vivre son identité s’est considérablement rétrécie. Cette crispation nourrit un climat d’incertitude, d’angoisse et de défiance qui pèse sur la santé des citoyens.
Le désengagement en matière d’écologie, constaté lors de la récente conférence des Nations Unies sur les océans à Nice, inquiète la communauté internationale. Les États-Unis, parmi les plus gros émetteurs mondiaux de CO₂, manquent d’implication, avec un effet domino sur la motivation collective et la capacité d’entraînement mondiale. À l’intérieur du pays, les mouvements écologistes et réseaux de permaculture continuent malgré tout de croître, mais souvent en résistance face à l’hostilité politique.
Face à l’accumulation de tensions, l’image des États-Unis s’écorne auprès des voyageurs – en particulier Européens. Le directeur adjoint d’un grand tour-opérateur français observe une baisse de 20 % des réservations estivales : beaucoup de familles se détournent des USA, jugeant le climat social et politique trop incertain, au profit de destinations plus accueillantes.
À l’échelle européenne, la dynamique semble aller vers davantage de coopération, d’investissement responsable ou de relance verte, contrastant avec le choix du repli américain qui risque d’isoler ses citoyens, y compris sur le plan du bien-être.
Facteurs de repli et élans de résilience
Derrière ces évolutions, on perçoit une spirale où décisions politiques, climat social, sécurité, santé mentale et espoirs écologiques s’entremêlent. Au cœur de cette tourmente, les citoyens s’organisent malgré tout pour préserver des repères : développement de groupes de soutien, multiplication des initiatives locales pour promouvoir l’inclusion ou renforcer l’entraide écologique.
Au sein de certaines villes progressistes, des marches des fiertés sont organisées malgré les tensions ; des groupes de parole et des réseaux de soutien se multiplient – plus de 500 sont recensés pour les personnes trans en 2024. Dans les zones rurales, seuls 15 % des jeunes LGBT+ déclarent avoir accès à un espace sûr ou à un groupe de soutien, l’isolement reste donc criant. Malgré le retrait américain des engagements climatiques, des collectifs citoyens se mobilisent contre la désertification urbaine via des fermes partagées et des ateliers de pleine conscience, comme à Portland (Oregon) où l’on compte plus de 80 fermes collaboratives apparues depuis 2017.
Selon une enquête Pew Research publiée début 2024, plus de 60 % des Américains déclarent s’investir, même modestement, dans au moins une activité favorisant le mieux-être (méditation, bénévolat, alimentation durable), illustrant un mouvement de résistance face à un climat anxiogène.
Un horizon incertain, mais des réseaux résilients
La situation américaine continue d’évoluer au fil de l’actualité politique, sociale et écologique. Si des défis majeurs persistent, des modèles de bien-être inclusif et durable émergent, portés par l’énergie collective de parents, enseignants, associations et jeunes engagés. Les expériences locales, les réseaux d’entraide, et les gestes solidaires discrets inventent partout les conditions d’une société plus juste, ancrée dans l’écoute et le respect du vivant.